Le rodéo, un univers impittoyable? – Partie 1: Bronco riding

L’image la plus connue du rodéo est celle d’un cow-boy chevauchant un cheval ou un taureau sauvage. En réalité, les rodéos sont des événements composés de plusieurs épreuves mêlant équitation western et travail du bétail. Certaines épreuves sont très controversées, surtout d’un point de vue non-initié. J’ai donc mené ma petite enquête dans les méandres d’internet pour essayer de voir si ces critiques sont fondées ou non.

Bronco Riding

Le bronco riding est l’une des épreuves les plus connues, celle à laquelle on pense souvent en premier, avec le bull riding, lorsqu’on parle de rodéo.

Il s’agit pour le cow boy de monter un cheval sauvage sellé (saddle bronc) ou non (bareback bronc) et de rester en selle respectivement 10 ou 8 secondes pour l’une et l’autre des épreuves.

Bronc ride

Les chevaux présentés sont-ils sauvages?

Les chevaux utilisés ne sont jamais sauvages. Les organismes chargés du commerce de chevaux sauvages comme le Bureau of Land Management aux USA interdisent dans le contrat d’adoption que le cheval soit utilisé pour son côté sauvage par sa famille d’accueil.

L’origine du bronco riding remonte cependant à une époque où de véritables chevaux sauvages étaient utilisés. Aujourd’hui, pour les besoins du spectacle, on privilégie les chevaux ayant des réactions impressionnantes, mais ils sont tous domestiqués.

Si ce sont bien des chevaux dressés qui participent à ces épreuves, pourquoi ont-ils une réaction si violente lorsqu’ils ont un cavalier sur le dos?

Les chevaux de bronco sont en fait élevés pour devenir chevaux de rodéo et sont choisis par rapport à leur tendance naturelle à ruer. Ils vivent généralement en semi-liberté entre chaque prestation, donc souvent hongres ou juments pour faciliter la gestion du troupeau.

Les ruades d’apparence violentes sont donc dues à une éducation de ces chevaux, comme d’autres apprennent le cabré ou la croupade, ceux-ci apprennent à ruer en levant les postérieurs le plus haut possible. Ils valent d’ailleurs assez cher sur le marché, les plus spectaculaires pouvant atteindre plusieurs millions, et sont alors (très) bien traités par leurs propriétaires.

MAIS, oui, comme dans tous les milieux, il y a des personnes moins honnêtes que d’autres qui forcent la main pour obtenir de tels résultats. Un bronc de qualité à $500 000 ou plus, on en prend soin et on évite de lui casser le dos. Un cheval qui aura tendance à ruer, mais pas de là à vraiment impressionner le public, c’est une toute autre histoire.

Il y a le cas des chevaux d’élevage qui n’ont tout simplement pas le talent de leurs frères et soeurs, mais aussi les chevaux de selle vendus par leurs propriétaires car ils avaient tendance à ruer. N’ayant pas été élevés pour cela, ils ruent fort pour des chevaux de selle, mais sont loin des performances des broncs dressés pour cela. On leur demande d’accomplir des prestations qui vont à l’encontre de leur dressage d’origine, et il arrive donc dans certains rodéos que les cow-boys ou les « aides » utilisent des moyens artificiels pour encourager le cheval à agir comme un cheval sauvage. Même s’ils ruent, il est rare que ces chevaux aillent jusqu’à oublier les fondamentaux de leur débourrage: faire tomber son cavalier, c’est mal. User de violence est plus rapide que de les rééduquer, et c’est l’option que peuvent choisir les showmen peu scrupuleux.

painted-valley

Painted Valley joue les sauvages sous les projecteurs, mais vit sa vie d’étalon en semi-liberté avec ses juments une fois de retour dans son ranch natal du Colorado

Comment faire la différence entre un cheval dressé pour faire semblant d’être sauvage et un cheval maltraité lors du rodéo?

Les sangles arrières qui font polémique sont utilisées en équitation western dans les disciplines qui demandent d’accomplir de grands mouvements rapides sur des chevaux où la selle risquerait de bouger ou trop avancer, en complément ou pour remplacer un collier de chasse. Elle est sanglée assez lâche (on doit pouvoir passer au moins une main) et ne gêne en aucun cas les mouvements du cheval. Cependant, certains broncs sont « chatouilleux »: ce sont les plus prisés, car le mouvement de la sangle peu serrée sur leurs flancs va les encourager à ruer ou galoper vivement. La sangle arrière est donc normalement plus ou moins desserrée selon la sensibilité du cheval. Un article intéressant sur le sujet sur le blog de saddlefitting. Cependant, une sangle trop serrée autours de l’abdomen, éventuellement couplée avec des éperons à roulette aux pieds du cow-boy, peut être utilisée pour irriter le cheval et le blesser pour déclencher un mécanisme de défense et l’obliger à chercher à se débarrasser de son cavalier.

Les chevaux dressés pour ruer s’arrêteront une fois le cavalier à terre; un cheval maltraité s’arrêtera lorsqu’on desserrera sa sangle, ou, pour ceux qui portent des selles, qu’on enlèvera le quelconque élément blessant caché sous la selle (caillou ou autre élément dur blessant le dos).

Les chocs électriques peuvent aussi être pratiqués au départ de la stalle, à moins que la stalle de départ elle-même soit électrifiée. Ils sont difficiles à détecter depuis les tribunes car sont fait le plus discrètement possible pour éviter les ennuis avec les associations de défense des animaux.

L’animal électrocuté sort violemment des starting gates pour se soustraire au choc, mais un bronc connaissant bien son métier pourra faire de même sans « l’aide » du choc électrique. Délicat de porter des accusations dans ces cas-là…

Si vous avez des exemples d’autres types de maltraitance dans les rodéos, faites-le moi savoir par commentaire, je mènerai mon enquête!

Mais personne ne contrôle tout ça?!

Si! Il existe un règlement, et des représentants d’associations de défense des animaux sont présents lors des rodéos.Deadwood_rodeo_1

Chaque pays a son propre règlement, supervisé par l’association internationale de rodéo (IPRA). Tout en restant dans l’esprit rodéo, les mauvais traitements sont listés et interdits, parfois accompagnés d’exemples de sanctions plus ou moins sévères. Certains points sont assez vagues pour permettre de les comprendre un peu comme on veut. Par exemple, « si un animal est blessé pendant la performance, le participant n’aura pas d’autre tête durant ce tour« , sans préciser si le participant est censé continuer son tour quand même ou s’arrêter.

Il y a beaucoup de disqualifications possibles en cas de blessures ou comportement dangereux volontaire (que certains participants esquivent en plaidant ne pas avoir fait exprès, il y a des gens mal intentionnés partout), des précisions sur la qualité du matériel, des normes de sécurité, la gestion des troupeaux, le harnachement

Bien sûr, chaque rodéo peut choisir de comprendre tel ou tel point du règlement comme il le veut lorsque les interdictions sont un peu floues, ou trop vastes, et comme partout, il y a toujours moyen de jouer sur les mots ou de transgresser les règles en passant sous la vigilance des associations et représentants fédéraux.

Comment lutter contre les abus dans les rodéos?

Si vous êtes témoins ou que vous soupçonnez des mauvais traitements qui auraient poussés le cheval à ruer (cicatrices sur les membres, vive réaction du cheval lorsqu’on l’aborde…), n’hésitez pas à contacter:

En France

Aux USA

Qu’arrive-t-il aux chevaux après leur carrière de bronc?

Comme dans le monde des courses, certains partent à l’abattoir, d’autres seront reproducteurs et d’autres seront réformés chez des particuliers.

Les réformés ont besoin d’être rééduqués et ceux n’ayant pas été maltraités sont relativement faciles à reconvertir en bons chevaux de selle une fois sortis de l’environnement du spectacle car leur éducation les fait assimiler l’arène aux ruades, mais sortis de ce contexte, il est plus facile de leur réapprendre de nouvelles bases.

– article par Laure M.

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